Kathy Wakaluk-Yanco est mère d'un fils dans la vingtaine, aidante naturelle pour son père atteint d'un cancer de la prostate et membre du mouvement Mo Sœurs, où elle milite dans son milieu de travail pour améliorer la santé masculine.
Les hommes se sentent souvent obligés de refouler leurs émotions et de réprimer toute manifestation de vulnérabilité ou d'empathie. Cela affecte non seulement l'individu, mais peut aussi avoir des répercussions sur plusieurs générations. Je veux être là pour les aider à comprendre qu'il est normal d'être vulnérable et pour valider leurs sentiments.
Quand mon fils était adolescent, il s'est réveillé un matin et m'a dit qu'il ne voulait plus vivre. Je me souviens avoir immédiatement senti mon cœur s'emballer et avoir paniqué, pensant que je devais le sauver et sachant que je n'avais pas les outils nécessaires pour l'aider. Même si j'avais suivi une formation préalable en santé mentale, c'était différent, car il s'agissait de mon enfant. Ce n'était qu'un adolescent, un garçon intelligent, populaire et sportif, toujours prêt à aider ses amis. Il était bien élevé et gentil. Il n'était pas censé ressentir une telle douleur.
Depuis ce matin où mon fils m'a confié ses difficultés, je m'efforce d'avoir une relation plus ouverte avec lui. J'écoute davantage et je parle moins. Je prête attention non seulement à ce qu'il dit, mais aussi à la manière dont il le dit. Je soutiens ses décisions et je comprends qu'il est normal qu'il tombe parfois. C'est l'effort pour se relever qui les aide à grandir.
26 % des hommes se sentent victimes de stigmatisation lorsqu'ils s'engagent dans l'éducation à la santé. Chez les jeunes hommes, ce chiffre grimpe à 39 %. Consacrons-nous suffisamment de temps et de ressources à dialoguer avec cette tranche d'âge afin de comprendre comment mieux les atteindre, les éduquer et les aider ? En tant que femme, est-ce que je m'informe suffisamment pour être en mesure d'aider les hommes que je connais à avoir ces conversations sur la santé avec eux ? J'entends trop souvent dire que le système ne fonctionne pas.
Derrière chaque statistique se cache un fils, un père, un partenaire ou un ami, dont la vie compte et qui mérite mieux. Trop d'hommes au Canada souffrent en silence, meurent trop jeunes de maladies évitables, luttent contre des problèmes de santé mentale et se sentent livrés à eux-mêmes. Donner la priorité à la santé masculine, c'est sauver des vies, soutenir des familles et renforcer nos communautés.
Une stratégie en matière de santé masculine nous permettrait d'examiner de plus près les problèmes de santé propres aux hommes qui sont souvent négligés. Elle nous permettrait de sensibiliser davantage la population, d'encourager une intervention précoce, de promouvoir des modes de vie plus sains et de cibler les efforts de prévention sur les groupes à haut risque.
Avoir une stratégie permettra d'éviter que les hommes souffrent en silence. C'est un pas vers ce qui sauvera des vies. C'est important non seulement pour les hommes, mais aussi pour nos familles, nos communautés et l'avenir.
Nous devons faire comprendre aux garçons qu'il est normal de ressentir des émotions, de pleurer et de parler de ce qu'ils vivent. Élevons-les en leur apprenant que la vulnérabilité n'est pas une faiblesse, mais plutôt une preuve de courage. Apprenons-leur que la force ne réside pas dans le silence, mais dans la gentillesse, l'ouverture d'esprit et l'honnêteté face à leurs difficultés. Il s'agit d'être authentique avec soi-même et avec ses proches dès le plus jeune âge.
Je pense que nous avons fait beaucoup de chemin pour réduire les préjugés et éliminer les obstacles à la santé masculine, mais il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine. Je veux que mes petits-enfants et les générations suivantes grandissent dans une société où il est normal de parler de ce que l'on ressent sans craindre d'être jugé.